Alain Cantero est chef de pôle et psychiatre ; Julien André est médecin généraliste. Tous deux exercent au sein des Hôpitaux Saint-Maurice dans le Val-de-Marne (94).
Grâce au parcours de prévention somatique en psychiatrie, les Hôpitaux de Saint-Maurice ont remporté le troisième prix Mon Territoire de Prévention 2021, catégorie “Prévention en établissement de santé”.
En 2016, les Centre Médico-Psychologique (CMP) et Centre Municipal de Santé (CMS) d’Alfortville deviennent partenaires. Une convention les engage sur la prise en soin somatique et psychiatrique des Alfortvillais. En novembre 2020, suite à la création d’un poste de médecin généraliste à exercice partagé sur les structures ambulatoires pour favoriser la prévention (du surpoids/obésité, des addictions…) ; favoriser l’accès aux soins somatiques primaires et améliorer la prise en soins des patients en psychiatrie, ce médecin “partagé” aura finalement un rôle d’évaluation et d’orientation. Ainsi, il initie un parcours de prévention somatique et permet de renforcer le lien avec le médecin généraliste de ville du patient.
Les Acteurs de la Prévention : A la suite de quel(s) constat(s) avez-vous décidé d’engager un médecin généraliste à exercice partagé ?
Les patients en souffrance psychique sont souvent en grande difficulté pour organiser leur suivi somatique, surtout sur notre territoire (zone « déficitaire » au niveau médical). Comparés à la population générale, ils présentent une mortalité 3 à 5 fois plus importante et leur espérance de vie est diminuée d’une quinzaine d’années (15 à 20 ans selon les études). Le mode de vie, les effets secondaires des traitements et un moindre recours aux soins en sont les principaux responsables. Pendant de nombreuses années, la prévention et la prise en charge somatique des patients souffrant de troubles psychiatriques étaient largement insuffisantes.
A.D.P. : Quelles sont les actions mises en place par le médecin ?
Les actions ont étés orientées autour de 3 axes principaux :
- Le premier axe concerne la sensibilisation aux comorbidités somatiques. La non reconnaissance des problèmes de santé par les patients eux-mêmes, voire les professionnels de santé est responsable d’un moindre accès au dépistage, au diagnostic et donc aux traitements. Un travail au sein des équipes soignantes a été réalisé afin de les sensibiliser à dépister et évaluer les facteurs de risque de maladies cardiovasculaires et métaboliques des usagers.
A l’attention des usagers, un atelier « parlons santé » est organisé chaque mois. Son objectif est de créer un lieu d’échange autour d’un sujet de santé (somatique) et de répondre aux questions sur ce sujet ou sur la santé en général. D’autres ateliers spécifiques tels que « comprendre mon diabète » ou « mois sans tabac » sont organisés plus ponctuellement. Un programme d’éducation thérapeutique autour de la prévention de la prise de poids en psychiatrie ambulatoire est en attente de validation par l’ARS. Sur le plan individuel, des entretiens sont proposés aux patients qui le souhaitent, directement ou sur recommandation de l’équipe soignante.
- Le second axe vise à améliorer la coordination et favoriser un travail de liaison avec la médecine « somatique ». Des rencontres et des réunions cliniques sont organisées avec des médecins généralistes et d’autres intervenants médico-sociaux du secteur.
- Le troisième axe s’attache à améliorer l’organisation de la prise en soins des situations dites « complexes ». Des « consultations » de médecine générale ont lieu au sein du CMP / HDJ dans l’optique de coordonner le processus de soins et d’en assurer la continuité entre les différents acteurs impliqués tout en suivant l’évolution clinique du patient et favoriser l’adhésion à sa prise en soins.
A.D.P : Quels sont les résultats de votre action, comment les avez-vous mesurés ?
Le dispositif ayant débuté il y a moins d’un an, il n’y pas encore eu de mesures « objectives » des actions mises en place. De plus, le contexte de la crise sanitaire a mis de côté les soins de prévention et continue de limiter les rassemblements. Néanmoins, les échanges avec les usagers et avec les équipes de soins mettent en avant une amélioration de la prise en soins globale des patients.
A.D.P. : Votre action est-elle reproductible à l’échelle nationale ? Pour ce faire, que faudrait-il adapter ?
Ces actions sont reproductibles à l’échelle nationale et s’inscrivent dans un processus d’amélioration de la prise en soin somatique des patients souffrant de troubles psychiatriques. La prise en compte du contexte local est indispensable pour une organisation du travail en équipe au niveau territorial.
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