En France, plus de 11 millions de personnes accompagnent un proche handicapé ou en perte d’autonomie pour accomplir les tâches de la vie quotidienne, souvent au détriment de leur santé, mais aussi leur vie professionnelle et personnelle. La Ministre des Solidarités et de la Santé a annoncé que « le Gouvernement prendra dès 2020 des mesures en faveur des aidants qui soutiennent un proche âgé, malade ou handicapé, sous forme d’un congé rémunéré et/ou de “droits contributifs à la retraite”.
Dans le cadre de l’adoption d’une nouvelle loi consacrée à l’autonomie et à la prévention pour les aidants, le Club Acteurs de la Prévention s’est réuni le mercredi 11 septembre au Restaurant La Terrasse du 7ème pour un déjeuner-thématique sur la place des aidants dans notre société.
Stéphanie Pistre, Fondatrice du Cabinet Pistre et coordinatrice du Club Acteurs de la Prévention, a introduit la rencontre en rappelant l’un des partis pris du Club Acteurs de la Prévention qui est de « faire de la prévention une priorité de notre politique de santé en France et de réunir des acteurs différents et variés du système de santé ».
Jean-François Boulat, Vice-Président de Macif Mutualité et Pènda Bourrié, chargée du programme aidants-aidés pour le groupe Macif ont présenté les actions du groupe, qui depuis 2012, consiste notamment à améliorer la conciliation vie professionnelle et vie d’aidant.
En France, 4 millions d’aidants salariés doivent quotidiennement s’absenter de leur travail afin de prendre soin de la personne aidée mais également être joignable. Des accords internes aux entreprises permettant le télé travail ou la flexibilité des horaires permettraient davantage de confort aux aidants. Non rémunérés, ou faiblement indemnisés, il est donc primordial pour les aidants de maintenir leur emploi. De plus, cela leur permet de rompre avec la relation d’aide et de garder des liens sociaux en dehors de cette relation avec l’aidé.
La Macif a ainsi accompagné la rédaction par Blandine Bricka de trois livres de témoignages donnant la parole aux aidants, aux aidés et aux aides à domicile. Elle soutient également le court métrage « Vis ta Vie », réalisé par Nicolas Royer, mettant en scène le quotidien d’une personne aidante.
Hélène Rossinot, médecin et auteur du livre « les aidants, ces invisibles » a évoqué la nécessité de mettre en place un « parcours de l’aidant » visant à l’accompagner dès le début de son implication afin d’éviter des situations de rupture avec sa vie personnelle. Elle déplore également l’absence de données suffisamment récentes et pourtant essentielles en vue de concevoir des solutions.
Avec l’association Jade (Jeunes AiDants Ensemble), Hélène Rossinot a recueilli les témoignages d’aidants, parfois des enfants, qui mettent notamment en lumière l’absence de contact suffisant de la part des médecins. De plus, certains vides du système de santé conduisent à des situations dans lesquelles les personnes malades ne sont plus en mesure d’être accueillies dans des établissements de santé et doivent parfois vivre chez l’aidant.
La population des aidants est invisible mais celles des jeunes aidants l’est davantage. Le patient est au centre du soin et du traitement, mais les médecins, les infirmiers et les aides-soignants doivent aussi prendre en compte les aidants. Il y a un monde en dehors de l’hôpital dans lequel les aidants sont des piliers. De la même manière que les aidants salariés bénéficient, dans une moindre mesure, d’un accompagnement au sein de leur entreprise, il est nécessaire d’en faire de même concernant les aidants enfants.
Aussi, il existe des situations dans lesquelles des parents, parfois avancés en âge, doivent prendre en charge leurs enfants. Certes, le vieillissement de la population est une aubaine mais il y aura probablement de plus en plus d’aidants.
Serge Guérin, sociologue français, spécialiste des questions liées au vieillissement et à la « seniorisation » de la société, considère que la question des aidants englobe une problématique plus large, celle de savoir comme comment une société se préoccupe, accompagne et prend conscience de ses « derniers de cordée » de manière générale.
Un certain nombre d’acteurs, que ce soient des mutuelles, des laboratoires pharmaceutiques ou des collectivités, s’investissent aujourd’hui à améliorer le quotidien des aidants.
Il a notamment mis en avant le fait que plusieurs problématiques intrinsèques se posent lorsque l’on parle des aidants. Selon lui, il existe une prise de conscience, on connaît tous à minima quelqu’un qui aide quelqu’un. Il note que, majoritairement, les aidants sont des femmes, mais cela se confirme dans le milieu du soin en général.
Il existe autant de manières d’être aidant qu’il y a d’aidants, et cela s’explique par la diversité voire l’inégalité géographique, sociale et culturelle mais aussi selon la personnalité de la personne qui aide. Certains vivent cela comme un devoir moral, d’autres comme un devoir naturel ou une contrainte.
Pour Serge Guérin, les choses avancent mais il convient d’y accorder un financement. Finalement, l’aidant est gratuit et permet d’économiser entre 11 et 16 milliards d’euros. Les aidants permettent ainsi une économie à la collectivité. Il convient aussi de créer de l’emploi afin de prendre le relai sur les aidants et de ne plus compter que sur eux.
Enfin, l’agenda législatif présentant la réforme des retraites en parallèle de la loi nouvelle sur la perte d’autonomie, il serait opportun de faire un pont entre les deux projets de loi.
Pour conclure, Agnès Firmin Le Bodo, députée de Seine-Maritime, investie sur la question des aidants, a pris la parole. Selon elle, nous sommes tous concernés et à tout moment de notre vie, parfois jeunes parfois plus tard.
La prise de conscience est récente, pour la première fois en 2015, lors de la loi relative à l’adaptation de la société au vieillissement, l’aide aux aidants a été évoquée. Un dispositif législatif visant à accompagner les aidants à hauteur de 500 euros a été imaginé.
Pour Madame la Députée, il est important que ce sujet soit politiquement transpartisan. C’est un sujet multi factoriel, mais à la base c’est une solidarité qu’il convient d’accompagner et de protéger. Aussi, il faudra mettre des moyens pour permettre le maintien à domicile des personnes le plus longtemps possible.
Charlotte Lecocq, Députée du Nord, et Josiane Corneloup, Députée de Saône-et-Loire, se sont ensuite exprimées sur cette prise de conscience transpartisane qui nécessite maintenant une stratégie d’actions. Les parlementaires sont mobilisés sur le sujet et il faut répondre, accompagner et prendre en compte la multiplicité des situations existantes.
Dans ce contexte, le Club des Acteurs de la prévention pourrait envisager de décliner son appel à candidatures « Mon territoire de prévention » pour mettre en lumière des solutions qui ont fait leur preuve en vue de faciliter le quotidien des aidants.
Comments are closed.