Pour sa première rencontre de l’année, le Club Acteurs de la Prévention a réuni plusieurs intervenants à l’INJS le mardi 30 janvier, tous témoins et experts du changement de paradigme qui s’est opéré en Chine depuis le début de la mondialisation, notamment en matière de santé et de prévention.
A l’heure où l’Occident tente de faire évoluer un système de santé dominé par le curatif vers davantage de prévention, la Chine s’occidentalise et voit ses habitudes de vie, d’alimentation, de consommation, changer radicalement.
Isabella Obrist, thérapeute, spécialiste de la médecine traditionnelle chinoise, a évoqué les dangers de la mondialisation de l’alimentation sur les modes de vie dans l’Empire du Milieu. Rappelant que l’un des piliers de la médecine chinoise est la cuisine qui nous permet par la manière de s’alimenter, de bénéficier des bienfaits d’une diététique ancestrale reposant sur l’équilibre entre température du corps et des aliments, l’harmonie des cinq éléments et des cinq saveurs agissant tant sur l’énergie vitale, la digestion, le bien-être, la longévité.
Grâce à son livre et à son site internet “Petit Ventre Heureux”, Isabella publie des recettes et donne des cours de cuisine et de nutrition pour réapprendre à nous alimenter sans nous affamer, ou nous priver, y compris pour les femmes enceintes. Elle préconise de s’alimenter avec des aliments de saison, des épices qui font chauffer le corps”et activent la digestion, pour activer le “feu digestif”.
Par ailleurs, il semblerait que les chinois et les européens, ayant une histoire, des traditions et une génétique différente réagissent différemment au même régime alimentaire. Si les chinois revenaient aux modes d’alimentation de leurs ancêtres , l’obésité et le diabète seraient d’ores et déjà des fléaux du passé!
Emmanuel Bonhomme, PDG de Johnson & Johnson France Medical Devices, qui a vécu et travaillé en Chine pendant plus de vingt ans, a pu observer des changements apparemment anecdotiques, mais devenus prégnants dans le mode de vie chinois, qu’il s’agisse du remplacement de la bicyclette par l’automobile dans certaines provinces, ou de l’arrivée des fast-foods, et de la mode d’une alimentation importée dés que la population accédait à un certain niveau de vie.
Selon lui, les chinois doivent retrouver leurs racines et habitudes alimentaires, qui inspirent de plus en plus les modes de vie des occidentaux.
En préalable, Emmanuel Véron, docteur en géographie à l’INALCO et spécialiste de la Chine contemporaine rappelle qu’il n’y a pas qu’une seule Chine, mais bien “des Chines», compte tenu de l’immensité de ce territoire. Les disparités de revenus, de modes de vie, de démographie et de santé sont considérables d’une région à l’autre. Pour Emmanuel Véron, l’essor de la Chine s’est fait de manière trop rapide pour que les modes de vie des chinois aient eu le temps de s’adapter. Par conséquent, ces mutations alimentaires se sont opérées de façon très brutale, ce qui a crée un boom du taux de diabète et d’obésité en Chine.
Pour Isabella Obrist, les différences génétiques sont notables entre un américain par exemple et un chinois, illustrées par l’exemple du lait de vache. Ainsi, un chinois ne digèrera pas le lait de vache de la même manière qu’un américain car il ne produit pas les mêmes enzymes lui permettant de digérer le lactose. De cette manière, le soja est très répandu dans la cuisine asiatique et pratiquement absent des régimes occidentaux, en raison de sa forte teneur en oestrogènes. Or, une femme asiatique produit un taux d’oestrogènes très par rapport à une européenne. Le soja est susceptible de créer un déséquilibre hormonal chez certaines femmes européennes.
On retiendra de cette conférence que la Chine et l’Europe doivent coopérer pour partager leurs connaissances mutuelles en matière de santé et d’alimentation.
Cette mutualisation des savoirs sera nécessaire pour accompagner les nouveaux modes de vie à l’occidental des chinois vers le bien-être et la prévention, mais également prévenir et guérir leurs conséquences, notamment l’essor de l’obésité et du diabète dés le plus jeune âge.
Photos: Emmanuel Bonhomme
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